Le Ragondin Furieux

Le Ragondin Furieux

Langage de la croyance et hyper-rhétorique au service du pouvoir.

Langage de la croyance et hyper-rhétorique au service du pouvoir.

 

 

L'introduction qui suit m'avait paru très explicative et résumait bien le pourquoi du consentement qui peu à peu colonise les consciences. C'est la raison pour laquelle je donne à lire cet avant propos et y ajouterai à la fin une suite de réflexions sur l'imprégnation du consentement dans notre société.


-Introduction pour annoncer les rencontres du Collège international de philosophie, débutant le mardi 16 février (Salle des Médailles, Lycée Henri IV, 23 rue Clovis, 75005 Paris) sur le thème, Faut-il croire…, plus précisément, « Langage de la croyance et hyper-rhétorique au service du pouvoir » sous la responsabilité de Rada Ivekovic-

 

« La croyance est un dispositif du pouvoir, d'autant plus efficace qu'il passe par l'individu et incite à l'obéissance. L'État standardise la langue et exerce son autorité par elle.

 

Comment passe-t-on de la parole à la menace puis à la violence physique si nécessaire ?

 

Quelle est la distance entre la peur, une population tenue en respect, et la guerre ?

 

Par le discours sur la menace venue des autres (par les mots), on légitime et justifie par avance sa propre « riposte » bien réelle et l'on passe ainsi à l'acte. La violence dans, de et par la langue existe. De langagière elle peut devenir physique, et prendre l'allure d'une légitime défense, celle d'une (im)-posture patriotique, étatique et « étatisante ». Cette condition peut se mettre en place en très peu de temps et passer par le discours. Un inconfort ou une menace auxquelles leur propre gouvernement les soumet, par exemple par des alertes ou par des menaces sans qu'il y ait même encore eu des attaques, suffisent pour transformer de pacifiques citoyens en nationalistes prêts à l'assaut en se croyant sur la défensive. Quelques images menaçantes à la télévision (un blindé et une camera suffisent), et la partie est gagnée. C'est la leçon des guerres des Balkans dans les années quatre-vingt-dix.

 

Dans de tels moments de « sécurité nationale » bien accomplie et menant, par une rhétorique bien ciblée, à l'homogénéisation de l'opinion publique, on pourra créer le consensus, la croyance d'une grande partie de la population en presque n'importe quelle politique. On utilisera au passage, de manière instrumentale, des valeurs figeant et séparant les genres. Mais cela n'aura pas lieu sans une « désémantisation » colossale et une perte de langage commun.

 

La « désémantisation », avec « resémantisation » si besoin, est à l'œuvre en tant que technologie du pouvoir incitant à la croyance, dans la nouvelle topographie de la déterritorialisation de la terreur (celle qui peut nous frapper n'importe où) et de la reterritorialisation des hégémonies. »

 

Cette dépendance intellectuelle crée par la forme sémantique, que l'on retrouve dans une uniformisation de la pensée volontairement propagée par les médias dominants, nous amène à des sortes de reflexes intellectuels conditionnés ; on a « prosélyté » le conscient pour formater l'inconscient !

 

D'ailleurs l'anecdote que je vais conter, qui fut probablement plus courante que ce que l'on pense, résume bien une croyance, celle en la dangerosité extrême de la catastrophe grippale, cela venant à la suite d'un battage médiatique particulièrement bien orchestré…

 

Dans la salle d'attente de ma généraliste, je patientais comme souvent, quand je vis la porte du cabinet s'ouvrir brutalement mue par la Doctoresse en colère, le doigt pointé vers la sortie, et qui gueulait à un couple âgé : « Tenez, voilà une boite de Taniflux, vous pouvez l'avaler tout entière, toute suite, cela n'y fera rien !!! Une rhyno. soignée, ça dure 8 jours, mal soignée, une semaine ! » ; ceci dit, elle les fout à la porte en me disant qu'elle allait prendre ses congés, et m'explique.

 

Avec le retour du froid un peu plus vif beaucoup de gens attrapent des rhinopharyngites, voire des bronchites, mais aucun cas de grippe H1N1 dont il semblerait que l'épidémie soit en partie enrayée. Il n'empêche que les esprits ayant été particulièrement formatés beaucoup sont persuadés qu'il s'agit d'un retour d'une hécatombe…

 

Cet épisode n'est pas en réalité qu'anecdotique, il est l'exemple même de la manipulation des masses par le pouvoir, on a crée une « croyance ». Cela va encore beaucoup plus loin quand il s'agit d'un conditionnement de fond de manière à façonner une société tendant vers une forme de pensée unique.

 

Plus loin et plus pervers aussi, en effet, je ne pense pas m'éloigner de trop du sujet en parlant de la rhétorique prosélyte qui a été utilisée pour introduire le spirituel en politique ; plus exactement la religion de façon générale avec toutefois une orientation vers une religion bien marquée comme c'est le cas dans notre pays.

 

Cela a commencé par le discours du Latran où le chef d'un état neutre en matière religieuse, donc à priori laïc, a fait l'éloge du spirituel -mais surtout de la religion chrétienne en ayant mis le curé au-dessus l'instituteur en matière éducative- comme élément indispensable de la pensée de l'individu. Puis cette notion fut sous-jacente dans le fumeux débat sur l'identité nationale.

 

Ce qui fait que depuis le départ on a faussé le débat en façonnant une « croyance » sur la religion, en la rendant en quelque sorte comme un impondérable de notre société. La dialectique s'appuyant en plus sur un terreau favorable puisqu'il n'y a y jamais eu de véritable interrogation du peuple sur les religions, celles-ci étant ancrées par un consentement inconscient collectif faisant partie de l'espace de réflexion personnelle d'un nombre important d'individus. Il n'est donc pas posé la véritable interrogation du pourquoi d'une religion.

 

Si l'on admet que la croyance en un dieu quelconque n'est que la résultante de la sensibilité personnelle à imaginer un au-delà de chacun, peut-on en déduire qu'il faille, est-il indispensable de mettre en concept, voire en dogme, cette croyance somme toute propre à chaque individu ? Quel intérêt y-a-t-il à rassembler sous des formes conceptuelles diverses les croyants à un dieu unique. D'autant que tout cela est basé sur une incertitude, ce dieu que l'on encense n'est-il pas qu'une allégorie !

 

Il est évident, que l'on retombe alors avec les religions dans un concept sociétal s'appuyant sur une croyance. Il s'agit d'un façonnage de l'individu, de l'esprit d'une société reposant sur un carcan de principes rigides et intransigeants, principes souvent venus d'un maniement rhétorique répercuté d'une manière pratiquement semblable au cours de l'évolution de la société. On assiste donc à un formatage constant de la pensée dans le sens d'une religion pour une communauté déterminée, il en va de même pour d'autres religions dans d'autres espaces communautaires. C'est donc une aliénation de l'esprit que nous offre le religieux, on a crée une croyance envers une religion aliénante et ceci au départ sur une croyance imaginaire. Les religions ont donc instauré des formes de pouvoir que leur rhétorique a confortés en entretenant la « croyance » qu'elles étaient utiles, voire incontournables.

 

Le débat sur l'identité qui n'a pas affiché ouvertement cette notion sociétale, pourtant elle fut latente opposant l'islam à la religion chrétienne, que l'on voudrait comme moteur de la société française. Ne s'est donc pas posé la question de remettre en cause le fait religieux en lui-même, mais de sa place dans la société, c'est ce qui était voulu dans le discours du Latran, et c'est ce qui a été réussi avec la relance du débat sur le foulard islamique en politique. En réalité, la croyance pour le fait religieux incontournable étant acquise, on occulte inconsciemment le vrai débat en discourant sur la présence où non des symboles religieux dans une république laïque.

 

N'aurait-il pas été mieux d'abord de discuter du fait religieux et de son aliénation, car là est la vraie question. A savoir aussi, comment se défaire du consentement inconscient….

 

On ne peut que constater qu'un langage fort et orienté a par conséquence modifié la réflexion essentielle sur une question de fond pour toute une société !

 

 

 

 

 

 

 

 



14/02/2010
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